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Par André Maman

Le 8 décembre dernier, à la mairie du le arrondissement de Paris, le Sénateur André Maman, longtemps professeur de Civilisation française à la prestigieuse Université améri­caine de Princeton, dans le New Jersey, de 1958 à 1993, quand il a dû démissionner de son poste pour occuper ses nouvelles fonctions de Sénateur des Français établis hors de France, a traité de la présence française aux Etats-Unis.

En préambule, le Sénateur Maman a tenu à dire avec beaucoup de force : « J’ai toujours été attiré par les Etats-Unis, depuis mon ado­lescence, je savais que j’irais un jour vivre dans ce pays. Mon rêve de jeunesse s’est réalisé et je peux dire que depuis 40 ans, que je réside dans ce pays, j’ai appris à bien le connaître et surtout à l’aimer. »

Il faut noter, dès l’abord, que la présence sur le continent américain est ancienne et remonte au XVI’ siècle. Déjà de nombreux explorateurs français avaient été attirés par l’Amérique et certains s’étaient même installés dans ce nouveau continent.

Jehan de Verrazano, chargé par le Roi François-ler de découvrir le passage du nord-ouest en direction des Indes, débarqua sur les côtes de Caroline du sud et, se dirigeant vers le nord, découvrit le site du futur port de New York. Jacques Cartier reconnut l’estuaire du fleuve St-Laurent et remonta jusqu’au site qui est aujourd’hui occupé par la ville de Québec. Au côté de Samuel de Champlain, qui décou­vrit une grande partie du Canada, d’autres explorateurs, qu’ils furent des religieux ou non, marquèrent la présence de la France le Père Marquette et Louis Joliet revendiquèrent le cours du Mississippi et Cavelier de la Salle explora cette région qu’il baptisa Louisiane, en l’honneur du roi de France.

On peut regretter que cette immense région appelée Louisiane, mais qui couvrait beaucoup plus que la Louisiane actuelle et qui comprenait peut-être un tiers de tout le territoi­re, ait été cédée, en 1804, aux Etats-Unis par Napoléon.

Au moment où les Américains ont voulu se libérer de la colonisation anglaise et ont tenu à conquérir leur indépendance, la France, en la personne de Louis XVI et du Comte de Vergennes, a décidé d’envoyer une armée et une flotte qui comprenaient, à elles deux, plus de 60 000 soldats et marins. On n’avait jamais vu sous l’Ancien Régime une armée et une flot­te ainsi réunies. Ce sera la bataille de Yorktown, le 19 octobre 1776, où l’Armée bri­tannique, assiégée par les forces françaises et par les « insurgents », se rendit au général Washington et au général Rochambeau. Sans l’aide de la France, et il faut bien insister sur ce point, l’indépendance des Etats-Unis n’aurait jamais été acquise aussi rapidement.

En ce qui concerne l’immigration des Français vers les Etats-Unis, à partir du XIX’ siècle, il faut remarquer qu’il n’y aura jamais d’immigrés de masse, comme cela a été le cas pour d’autres pays d’Europe. On peut penser à l’Italie, à la Suède, à la Norvège et surtout à l’Irlande, où les immigrants étaient poussés par la misère et quittaient le Vieux Monde en très grand nombre.

De nos jours, on compte aux Etats-Unis 250 000 Français répartis dans les 50 Etats du pays. C’est le plus grand nombre d’expatriés français dans un pays étranger, puisque c’est l’Allemagne qui vient ensuite avec 160 000 immigrés et la Belgique loin derrière.

De plus, le nombre d’immigrés français aux Etats-Unis a tendan­ce à s’accroître et, s’il n’y avait pas de restrictions de visas, imposées par le gouvernement américain, l’immigration serait beaucoup plus forte. Il est très difficile d’obtenir la fameuse « carte verte », qui permet de travailler aux Etats-Unis. L’intérêt et l’attrait, que présentent les Etats-Unis pour nos compatriotes, sont très élevés, à en juger par les demandes que nous, Sénateurs des Français établis hors de France, recevons régulièrement.

Les implantations françaises aux Etats-Unis se trouvent concen­trées dans certaines villes, et je pense à New York, où l’on en compte environ 65 000, à San Francisco, à Chicago, à Houston et à Los Angeles.

Les deux tiers de ces 250 000 Français sont des binationaux, puisqu’en Amérique existe le droit du sol, c’est-à-dire que tout enfant né aux Etats-Unis est automatiquement citoyen américain, quelle que soit la citoyenneté de ses parents. Autrefois, il fallait choisir à 18 ans entre la citoyenneté française et américaine, mais cela a disparu depuis longtemps. On peut rester binational toute sa vie, et ceci est vrai aussi bien pour les hommes que pour les femmes.

La question de la « carte verte » se pose et elle est en ce moment très difficile à obtenir. Toutefois, il existe une « loterie » où chaque année sont attribuées par ordinateur 50 000 « cartes vertes », à ceux qui ont décidé de participer à cette loterie, et qui évidemment remplis­sent certaines conditions.

Aux Etats-Unis, nous comptons, en plus de l’Ambassade de France à Washington, 10 Consulats Généraux de France, depuis que ceux de Détroit et de Porto-Rico ont été fermés. Ceci a d’ailleurs per­mis d’ouvrir deux nouveaux Consulats Généraux, à Atlanta, en Géorgie, et à Miami, en Floride.

Il faut noter que les implantations françaises, comme les mouve­ments de population aux Etats-Unis, se déplacent vers le sud et Miami est devenu un très important Consulat Général.

En ce qui concerne les Ecoles françaises accréditées par le Gouvernement français, on en compte maintenant 35, ce qui est le nombre le plus élevé dans un pays étranger. On en trouve dans cha­cune des grandes métropoles du pays.

Ces Ecoles, qui ne sont pas uniquement destinées aux élèves français, sont fréquentées par de très nombreux élèves, dont un tiers environ est constitué par des Français, un tiers par des Américains et un tiers par des étrangers.

C’est une des armes culturelles les plus importantes de la France dans ce pays, où pourtant l’on compte de très nombreuses écoles élé­mentaires et secondaires de très haut niveau. Cela prouve que la qua­lité de l’enseignement français est très apprécié. En ce qui concerne les Universités américaines, dans chacune d’entre elles on trouve un Département de français, en général de haut niveau. Les meilleurs sont à Princeton, à Yale et à Columbia, mais on pourrait en citer facile­ment une trentaine de grande qualité.

Aux Etats-Unis, tout ce qui se fait d’important, du point de vue de la recherche et de la formation, a lieu dans les Universités et, en ce moment, le moral est à son point le plus haut. Il est vrai qu’on a tra­versé quelques crises, mais maintenant, surtout en raison du plein emploi, qui règne partout dans le pays, le moral est revenu. Toutefois, les Etats-Unis sont un pays difficile, où il faut beaucoup travailler et où on est sans arrêt remis en question.

A l’Université, les professeurs doivent beaucoup publier, être de bons professeurs, jugés par leurs étudiants chaque semestre, et parti­ciper à la vie du campus. Les étudiants universitaires français aux Etats-Unis sont de plus en plus nombreux et l’on en compte, sans avoir un chiffre précis, environ 20 000.

Enfin, il faut signaler que les investissements français aux Etats-Unis sont importants, puisque la France est le 4′ pays investisseurs, après le Royaume-Uni, l’Allemagne et le Japon. On trouve des implan­tations dans toutes les régions des Etats-Unis, non seulement de grandes multinationales, mais de plus en plus de PME-PMI.

C’est exact que les implantations françaises réussissent bien du moment que les dirigeants ont compris les attitudes à observer dans le monde du travail américain. D’après les investisseurs, on se sent libre d’innover, d’aller de l’avant et de réussir, si on y consacre les efforts nécessaires. On peut dire, sans équivoque, que les Etats-Unis donnent souvent aux immigrés, surtout aux jeunes, une chance qu’ils n’auraient peut-être pas trouvée en France.

Les Français s’adaptent très bien à la vie aux Etats-Unis, où ils apprécient l’accueil qui leur est réservé et les occasions qui leur sont données de réussir.

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